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Sans papiers mais pas sans droits !
Ils occupent leurs entreprises depuis le 12 février 2018

Initialement 115, ils sont aujourd'hui 167 grévistes travaillant dans sept entreprises d'Ile-de-France, chacune dans un secteur différent. La CGT a publié différents communiqués pour faire connaître et soutenir ce mouvement :
- un premier le 12 février ;
- un autre le 5 mars.
La CGT-B (Burkina Faso) a elle aussi rédigé un communiqué de soutient aux grévistes (à retrouver ici).

Nous vous invitons à passer les voir, même cinq minutes. Une simple "visite" est pour eux un véritable soutien qui compte. Voici les lieux des piquets de grève en Ile-de-France :

- DEFI TECHNOLOGY (intérim) au 16 Avenue Dausmesnil PARIS 12ème ;
- CHRONOPOST (distribution de colis express) au 9, rue Clément Ader, dans la zone de la Butte aux Cailles à CHILLY MAZARIN - 91 ;
- GLS (logistique transport) au 29, rue Jean Moulin à ROISSY - 95 (à côté de la commune de Roissy) ;
- EVENT-THAI (plats cuisinés ) sont en grève au 8/10 rue Henri Dunant CHEVILLY LA RUE - 94 ;
- STLG (collecte et de recyclage de déchets ) au 74 avenue du Général de Gaulle LA QUEUE EN BRIE - 94 ;
- Depuis le 20 février FRANCE-ROUTAGE au 2 Avenue Gutenbergà BUSSY-SAINT-GEORGES - 77.


Les membres de l'UJR d'Ile-de-France sont passés à de nombreuses reprises au piquet de grève situé dans l'entreprise d'intérim DEFI TECHNOLOGY au 16 Avenue Dausmesnil PARIS 12ème (près de gare de Lyon). Au fil de ces passages, nous avons apporté notre solidarité de différentes manières : un don d'une dizaine d'exemplaires de notre dernier numéro du Fil Rouge, un don de 50 € pour la caisse de grève ainsi qu'un don de 33 de nos badges. Pour que cette lutte sorte des cercles militants nous avons également ramené un témoignage d'un jeune grévite à retrouver ci-après :



Témoignage de Dama, travailleur sans papier pour l'agence d'intérim DEFI TECHNOLOGY

Présentation :

Je m'appelle Dama, j’ai 23 ans et ça fait trois ans que je vis en France. Je travaille dans le bâtiment pour cette entreprise d’intérim depuis maintenant presque 1 an. Le plus régulièrement je m’occupe d’effectuer des coffrages et je fais de la maçonnerie.

Qu'est-ce qui t'a poussé à partir du Mali ?

Au Mali il n'y a pas de travail. On est parti à 3. Ma mère faisait tout pour nous aider. On a travaillé 4 ans en Côte d'Ivoire avant de prendre la route par la Lybie, l'Italie avant d'arriver en France.

Pourquoi choisir la France ?

Le Mali et la France sont liés, on sait tous que le pays est une ancienne colonnie française. Je n'ai pas eu la chance d'aller à l'école alors la seule langue européenne que je connaisse c'est le français, Et puis au Mali on voit souvent des entreprises françaises comme Total, Canal+, Orange.

Comment s’est déroulée l’organisation et la préparation de la grève ?

Au début je n’étais pas au courant de la préparation de la grève. C’est un collègue qui y participait qui m’a emmené aux réunions. Il y a trois mois nous avons commencé à nous réunir pour voir comment nous pouvions agir de notre côté. Puisque ça ne donnait rien nous sommes allé voir la CGT.

Comment a réagit ta famille quand elle a su que tu allais devoir arrêter de travailler et faire grève ?

Au début ma mère voulais que je continue le travail. En effet, j’envoie dès que je peux de l’argent à ma famille. Quant un travailleur sans papier se met en grève c'est donc plus d'une dizaine de personnes qui sont impactées. Je lui ai donc expliqué ma situation ici en tant que sans papier. Je lui ai dit que ça ne pouvait plus durer ainsi. Elle a finit par comprendre et aujourd'hui elle me soutient.

Combien êtes-vous de travailleurs sans papiers dans la société ?

Nous sommes plusieurs centaines de travailleurs sans papiers. Nous sommes 33 grévistes mais plusieurs dizaines d'autres voudraient rejoindre le mouvement.

Comment a commencé la grève ?

Nous occupons les locaux de l'agence depuis le debut, lundi à 10h. Au début ça a été compliqué, il y a eu des altercations avec le responsable de l’entreprise. Il avait décidé de nous couper le chauffage pendant la nuit. L’inspection du travail a été appelée par la CGT pour lui rappeler la loi. Depuis le chauffage a été rétabli.

Quels sont les rapports que vous avez avec l’entreprise d’intérim et le responsable de la société ?

Je suis sans papier, et ils le savent très bien. Au départ, j’étais payé 400 euros par semaine pour 39 heures avec des heures supplémentaires non rémunérées. Du jour au lendemain ils ont décidé de baisser mon salaire à 350 euros par semaine. Au vue de ma situation je n’étais pas en position de force pour négocier quoi que ce soit, j’ai dû accepter sans rien dire. Les responsables de l’agence savent que nous sommes dans des situations précaires et que nous ne sommes pas en mesure d’affirmer nos droits, ils nous payent comme ils veulent. Parfois nous n’avons ni contrats de travail ni de fiches de paies. L’entreprise nous paye par chèque. Le fait d’engager des travailleurs sans papiers et de ne pas tout déclarer lui évite aussi de payer les cotisations patronales. Nous sommes de la main d’oeuvre « bon marché » pour l’entreprise.

Comment cette situation a évoluée ? Quelles sont les positions du patron ?

Le patron a parlé avec les syndicats, il a vite compris qu’il n’avait plus le choix et qu’il devait absolument nous régulariser.

Comment imagines-tu ta vie après la grève ?

Dès que j’aurais mes papiers je souhaite commencer une nouvelle formation pour me trouver un autre métier. Je continuerai à soutenir la CGT et à être présent dans d’autres mobilisations comme celle-ci.


Paris, le 10 mars 2018